Le numérique va-t-il créer des emplois ?

Quels seront les impacts sur l’emploi de la nouvelle économie. Est-qu’au final cela va être destructeur d’emplois ou est-ce que cela va au contraire créer des emplois ?

La note du CAE publiée en octobre 2015 analyse les effets de l’économie numérique sur certains métiers. “Certaines professions réglementées se voient menacées face à l’arrivée de nouveaux acteurs : chauffeurs de taxi, libraires, hôteliers se mobilisent pour dénoncer les risques que l’économie numérique fait peser sur eux et se protéger contre ce qui est souvent qualifié de « concurrence déloyale ». Les métiers « routiniers », qui correspondent à l’essentiel des professions intermédiaires dans la distribution des revenus, se raréfient du fait de l’automatisation. Ces emplois (ouvriers, employés de bureau, etc.) sont exercés par un segment de la main d’œuvre particulièrement nombreux et emblématique : les travailleurs des classes moyennes, pour la plupart salariés – ceux-là mêmes qui sont au cœur de notre modèle social et dominent notre représentation du monde du travail.”

Le modèle Fordien qui a fonctionné pendant plus de 30 ans était basé sur l’industrialisation, avec des gains de productivité, des biens et services plus accessibles car moins chers et du pouvoir d’achat redistribué par les salaires qui permettaient d’augmenter la consommation. Ce cercle vertueux ne fonctionne plus. Les gains de productivité ne servent pas à produire plus, mais à améliorer la marge ou la maintenir. La croissance ne se fait plus par l’augmentation de la production, mais par l’apparition de nouvelles formes de production, de nouveaux services et surtout de nouveaux usages. L’économie numérique n’est pas tournée sur la production de biens, mais sur des usages. Pour satisfaire ces nouveaux besoins, il est inutile de construire des usines ou d’employer des milliers de salariés.

Il y a 10 ans les plus grosses capitalisations étaient des entreprises importantes au niveau du nombre de salariés (Exxon, General Electric, BP, Wal Mart). Aujourd’hui elles sont remplacées par des sociétés avec un nombre plus réduit de salariés. Google en totalisant les effectifs dans tous les pays employait  57.000 salariés en 2015. General Electric qui est devenue la 7ème capitalisation, donc loin derrière Google, employait 307.000 salariés en 2014. Walmart le leader mondial de la distribution emploie 2,2 millions de salariés mais sa capitalisation boursière est moins de la moitié que celle d’Apple. La capitalisation d’Airbnb (qui ne possède pas d’immobilier et qui emploie un nombre faible de salariés) est deux fois supérieure à celle d’Accor (240.000 salariés)

L’économie se transforme. De plus en plus souvent le service est produit par un non salarié. C’est le cas de Airbnb où l’hébergement et l’accueil des hôtes sont faits par les particuliers. C’est le cas des livraisons de repas (Delivroo ou Foodora) où les coursiers se connectent sur une application pour connaitre la prestation à faire et la rétribution qui correspond. Le lien n’est plus un contrat de travail, mais une connexion ! Avec cette nouvelle forme de travail il fallait faire évoluer la protection sociale des personnes concernées. C’est chose faite avec la Loi dite “El Khomri” d’août 2016 qui oblige une couverture accident du travail et maladie professionnelle avec une cotisation versée par le donneur d’ordre.

Le Conseil National du Numérique (CNN) dans un rapport remis en janvier 2016 a posé la question de l’impact sur l’emploi tant en nombre, qu’au niveau des qualifications. “L’économie numérique modifie structurellement la répartition des emplois entre peu qualifiés, intermédiaires et très qualifiés ; elle met fin à une tendance longue d’expansion du salariat, posant de nouveaux défis à la régulation et à la protection sociale.”

Ce ne sont pas les grosses entreprises qui créent de l’emploi, mais le développement des plus petites ainsi que les créations. Pour accueillir ces nouvelles pousses du numérique des structures apparaissent telle que La Cordée avec ses espaces de coworking ou l’Atelier de BNP Paribas. Il est aussi important d’accompagner financièrement la croissance de ces nouvelles entreprises, c’est ce que fait la BPI (Banque Publique d’Investissement) sous l’impulsion de son dirigeant dynamique Nicolas Dufourcq ou des structures comme Raise France.

Au final il est difficile de dire si le solde est positif ou négatif. Ce qui est sûr, c’est que si nous sommes dans l’inertie nous perdrons des milliers d’emplois et si nous sommes au contraire créatifs, innovants et que nous arrivons à adapter notre réglementation dans ce cas nous créerons des emplois.

L’économie numérique permettra de sauver notre industrie en intégrant l’automatisation et en soutenant l’innovation. Elle permettra aussi de poursuivre le développement des services par des usages nouveaux.

http://www.cae-eco.fr/IMG/pdf/cae-note026.pdf

http://cnnumerique.fr/wp-content/uploads/2015/12/Rapport-travail-version-finale-janv2016.pdf

Rotman D. (2013) : « How Technology is Destroying Jobs », MIT Technology Review, n° 12, juin 2013: https://www.technologyreview.com/s/515926

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *